Ordonnance /Pastoralisme

Ordonnance 2010-029 du 20 mai 2010 relative au pastoralisme

Le 14 avril 2010, lors de l’atelier de présentation du Projet de renforcement des capacités du Collectif des associations pastorales du Niger (CAPAN), le Secrétaire Permanent du Code Rural, M. Abdoul Karim Mamalo, a présenté aux participants les principaux articles du nouveau texte législatif sur le pastoralisme, qui n’avait pas encore été adopté.

Ce texte a pris la forme d’une ordonnance et a été signé le 20 mai 2010 par le Chef de l’Etat. Une copie scannée de ce texte est proposée en fichier joint (20 pages et 1,1 Mo).

Nous vous présentons le compte rendu de la présentation de Monsieur Abdoul Karim Mamalo, qui fait ressortir les points les plus importants de ce texte, présentation qui figure dans le compte rendu de l’atelier de CAPAN.


Extrait du Rapport de l’atelier de lancement du Projet de renforcement des capacités du Collectif des associations pastorales du Niger (PRC/CAPAN)

Cet exposé sur le nouveau texte de loi sur le pastoralisme était très attendu par les participants et a fait l’objet de nombreuses questions, ce qui démontre qu’il s’agit d’une réelle préoccupation.

Monsieur Mamalo a d’abord fait un tour d’horizon sur le calendrier de mise en œuvre du processus d’élaboration des textes sur le pastoralisme dans ses cinq étapes distinctives, depuis la phase préliminaire de conception des termes de référence en mars 2004 jusqu’à la phase d’adoption à l’Assemblée Nationale le 20 mai 2009 où le texte de loi fut présenté en débat. Les députés ayant demandé un atelier d’information pour le 28 juin, l’assemblée fut dissoute avant la date prévue.

Une des louables particularités de ce long processus, c’est qu’il a été participatif et itératif car ayant impliqué l’ensemble des organisations pastorales dans toutes les régions avec à son actif plus de 100 ateliers.

Voici quelques dispositions fondamentales du texte législatif sur le pastoralisme qui marquent une avancée significative pour les pasteurs, notamment :

L’article 3 : qui stipule que : « la mobilité est un droit fondamental des éleveurs, pasteurs nomades et transhumants ». Ce droit est reconnu et garanti par l’Etat et les collectivités territoriales ». En outre, la loi reconnait la mobilité comme un mode rationnel et durable d’exploitation des ressources pastorales.

L’article 5 : traite de l’interdiction de l’appropriation à titre privatif des espaces pastoraux relevant du domaine public de l’Etat et des collectivités. Cet article annonce à son alinéa 2 : « En particulier aucune concession ne peut y être accordée si elle a pour effet d’entraver la mobilité des pasteurs et de leurs troupeaux ainsi que leur accès libre aux ressources pastorales. »

L’article 12 : « Le droit d’usage prioritaire est un droit d’occupation, de jouissance et de gestion reconnu aux pasteurs sur leur territoire d’attache. » L’article donne la précision sur l’utilisation inclusive des ressources naturelles par des tiers en stipulant que les modalités de leur droit d’accès seront déterminées par les textes en vigueur et les us et coutumes locales.

L’article 17 : traite des modalités de gestion des puits publics à usage pastoral. « La gestion de tout puits à usage pastoral est du ressort de la commune en tant que maitre d’ouvrage. La commune peut faire appel aux services d’un comité de gestion ou toute autre forme de structure de gestion intégrant tous les usagers de l’eau dans le cadre d’une convention de gérance conclue entre la personne publique propriétaire et l’exploitant agissant en qualité de main d’œuvre. »

L’article 59 : Cet article place l’exploitation des terres salées sous la gestion des communes qui peuvent y prélever des taxes quand l’exploitation est faite à des fins commerciales. Cependant la collectivité peut l’interdire dès que cette exploitation compromet la possibilité pour les pasteurs de satisfaire leurs besoins.

L’article 55 : Tout comme le précédent, cet article place la gestion des bourgoutières dans les régions du fleuve, sous la tutelle des collectivités territoriales avec la collaboration des organisations des pasteurs et permet la création de structures de gestion sous la supervision de la commission foncière.

L’article 60 : L’article 60 est une innovation de portée extrêmement importante pour la gestion des pâturages en ce sens qu’il se penche enfin sur le prélèvement anarchique et incontrôlé de la paille.
Cet article stipule : « Le ramassage de la paille dans les campements et autour de ceux-ci ainsi que son stockage en haute brousse loin des habitations et sans protection appropriée sont interdits ».
Le ramassage de la paille dans les enclaves pastorales et dans les zones d’emprise des points d’eau, est réglementé. Le ramassage à des fins d’exportation est interdit et celui à des fins commerciales est soumis à une autorisation préalable accordée par le maire après avis de la commission foncière communale.

L’article 23 : Cet article relègue l’appartenance des stations de pompage au domaine public de l’Etat, de la Région ou du Département. Elles peuvent à titre provisoire faire l’objet d’une affectation à la commune.
Ce qui est important, c’est que la station ne peut être gérée par une tierce personne mais par une structure de gestion qui doit en assurer la protection. Elle-même est contrôlée par la commission foncière qui assure les conditions d’accès dans le respect des us et coutumes.

L’article 25 : Cet article sécurise les voies d’accès du bétail aux eaux de surface relevant du domaine public ou privé en zone des cultures. Ces voies d’accès relèvent du domaine public de l’Etat et leur obstruction est sanctionnée conformément aux dispositions du code pénal.

L’article 29 : Cet article lève une interdiction formelle qui empêchait aux éleveurs de faire pâturer leurs animaux dans les ranchs et les forêts classées dans n’importe quelle situation et permet maintenant leur utilisation comme zone de refuge en cas de grave crise de rareté de pâturage due aux sécheresses, mais fait obligation aux pasteurs du respect et du maintien de l’équilibre écologique.
L’article 30 : Il consacre comme un droit la libre circulation du bétail dans les aires pastorales et les couloirs de passage en saison des pluies. De même que la vaine pâture est un droit en milieu rural après la libération des champs.

L’article 34 : institue, pour permettre une bonne intégration de l’agriculture et de l’élevage, un système de fermeture et de libération des champs en zone agricole impliquant plusieurs niveaux, dont celui des pasteurs et des agriculteurs, des commissions foncières, dans la prise de la décision finale.

L’article 35 : Il vient en complément du précédent et stipule qu’aucune indemnisation de dégâts dans les champs de culture pluviale ne peut être réclamée au-delà des dates fixées pour la libération des champs.

L’article 46 : institue la détention des animaux en fourrière comme acte de service public destiné à sécuriser les animaux et non à les punir ; et par conséquent les animaux en cause ne doivent en aucun cas y être gardés dès lors que le légitime propriétaire reconnait les faits devant les autorités compétentes.

L’article 52 : vient régler le problème des terroirs d’attache des pasteurs en leur garantissant que même pour cause d’utilité publique, les concessions rurales ou minières ne sauraient remettre en cause ce droit que moyennant une juste et préalable indemnisation appréciée après une étude d’évaluation d’impact sur les systèmes pastoraux.

L’article 66 : indique que les procédures de conciliation des litiges doivent désormais être portées devant des commissions paritaires siégeant au niveau des villages, quartiers, tribus, groupements et cantons, provinces et sultanats. Les commissions sont présidées par le chef traditionnel du ressort et comportent en nombre égal des représentants des agriculteurs et des éleveurs.

Les débats, comme on pouvait s’y attendre, furent houleux, focalisés sur les ranchs privés qui poussent en zone pastorales et le ramassage de la paille à des fins commerciales ou d’exportation.
Une participante a fait remarquer que peu de gens connaissent ces informations importantes contenues dans la loi qui, une fois vulgarisée en langues nationales et portée à la connaissance du plus grand nombre d’éleveurs, aura un impact certain dans leur comportement.
Il faut remarquer en effet que malgré les nombreux ateliers de popularisation du processus, le besoin d’information demeure toujours. Un important travail de communication et d’information auprès des OP sera nécessaire après la promulgation de cette loi.

Ce texte est disponible dans la note jointe.

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