Mooriben /Financement des activités et des exploitations familiales

Répondre aux besoins de financement agricole du monde rural, un défi relevé par la FUGPN Mooriben au Niger - Zoom Microfinance n°36

Ce numéro de Zoom microfinance a été rédigé par : Nouhou Mahamadou, Chargé de programme microfinance à Mooriben, avec les contributions de Betty Wampfler, Professeur à l’IRC Supagro Montpellier et de Nedjma Bennegouch, Responsable des Partenariats (Bénin, Niger) à SOS Faim.

Le financement de l’agriculture, et des exploitations familiales en particulier, est un enjeu crucial en Afrique. En effet, aux côtés d’autres services non financiers pour soutenir les activités de production et de commercialisation, le crédit remplit une fonction économique centrale, à la fois pour financer les besoins individuels des producteurs et ceux de leurs organisations. Au Niger, les services financiers à la portée des paysans sont encore très peu développés : la microfinance, en particulier, répond de manière extrêmement insuffisante aux besoins des populations rurales. En 2011, le taux de bancarisation de la population nigérienne était ainsi estimé à 2,6% (source : BCEAO). Dans ce contexte difficile, une organisation paysanne comme la FUGPN-Mooriben a déployé, en une quinzaine d’années, un éventail de stratégies diverses et complémentaires pour répondre aux besoins financiers de ses membres, et ce dans une logique de « dispositif de services intégrés ».

Le présent document dévoile la très riche trajectoire de Mooriben pour assurer vaille que vaille une offre de services financiers adaptés et pérennes à ses membres… C’est une histoire passionnante, c’est à connaître et comprendre car c’est « notre histoire », c’est à lire et c’est résumé en 15 pages seulement.

Présentation de Mooriben

La fédération Mooriben compte, en 2013, 30 unions membres constituées par 1 541 groupements paysans qui regroupent 58.526 membres physiques dont 63 % de femmes.

La création de la fédération Mooriben, en 1993, intervient dans un contexte marqué à la fois par l’absence de structures étatiques de financement du monde rural et par les premiers pas de la microfinance au Niger. Mooriben s’est, dès sa création, heurtée aux questions de financements avec de multiples sollicitations de ses membres à la base.

Un diagnostic réalisé en 2002, fait ressortir les besoins suivants en financement, sous forme de crédit des membres de Mooriben : l’approvisionnement en intrants, l’acquisition de matériels agricoles et équipement de stockage et conservation, la commercialisation et le warrantage. Avec l’accroissement régulier du nombre de membres de la fédération (les unions sont passées de cinq à trente entre 1993 à 2012), de nouvelles demandes se sont exprimées et ont accru les besoins globaux.

Dans ce contexte, Mooriben a dû se forger son propre modèle de financement pour répondre aux besoins de ses membres, un modèle qui a évolué au fil du temps et au gré des situations et des besoins du moment. Ce modèle a développé quatre approches différentes, qui ont été mises en oeuvre de manière successive mais en se chevauchant très souvent les unes sur les autres.

- L’expérience de crédit autogéré :

Le crédit autogéré, comme son nom l’indique, est un système de crédit dont la gestion relève exclusivement des bénéficiaires ou de leur organisation. L’identification des bénéficiaires, l’octroi des crédits, le suivi et le recouvrement sont de la seule responsabilité des bénéficiaires.

- L’expérience des lignes de crédit à travers un partenariat avec des IMF :

L’expérience de partenariat avec les IMF date de 2000, avec l’apport des fonds importants de la part des partenaires destinés au financement des activités génératrice de revenu (une centaine de millions de FCFA). Chaque union a alors été appelée à négocier directement avec l’IMF qu’elle avait choisie comme partenaire. Le point essentiel des négociations portait sur les modalités de partage des intérêts générés par le crédit entre l’IMF et l’union. Il fallait que le coût du crédit reste conforme à la politique de crédit de l’IMF (taux d’intérêt, frais de dossier, dépôt de garantie). La plupart des accords ont été conclus sur un partage de 60% pour l’IMF et 40% pour l’union. Dans tous les cas, la part revenant à l’union était répartie en trois parties, respectivement pour l’union (35%), l’augmentation du capital (35%) et pour la fédération (30%).

- L’expérience de création de caisses :

A partir de 2002, en quasi concomitance avec la stratégie de partenariat développée avec des IMF existantes, la fédération a développé une troisième stratégie : l’appui à la création d’IMF par ses unions.

- Face aux difficultés, une réflexion stratégique pour un accès durable aux services financiers (2009 – 2012) :

Dans un contexte de croissance de son membership et d’évolution importante de la réglementation du secteur de la microfinance (loi BCEAO n°2010-04 du 21 janvier 2010), l’idée est venue à Mooriben et son partenaire SOS Faim d’établir un diagnostic afin d’avoir un état des lieux précis de la situation (sur les plans financier et organisationnel) et d’envisager les axes d’une stratégie de pérennisation du dispositif.

Ce diagnostic des deux plus importants maillons (les caisses et les lignes de crédit) de la chaîne du dispositif de crédit, confié à l’IRC-Supagro, a été réalisé en deux étapes (2009 et 2010), et a conduit à une prise de conscience de la gravité de la situation.

En 2010, un cadre spécialisé a été recruté pour prendre en charge le programme de microfinance. En juin 2011, Mooriben a lancé une étude d’opportunité pour la création d’une IMF de portée fédérale, dans la continuation des études de 2009-2010.

L’étude a fait ressortir les différentes voies que Mooriben pouvait emprunter au regard de sa culture et de la loi en vigueur afin de redynamiser son dispositif de crédit : création d’une IMF ou partenariat avec des institutions financières. L’étude proposait également une démarche pour arriver au choix définitif d’un modèle.

Le conseil d’administration puis l’Assemblée Générale, tenus en décembre 2011, ont adopté l’option de partenariat avec des institutions financières (IMF, banques, …) pour répondre aux besoins en crédit des membres de Mooriben.

- Les premiers pas dans la contractualisation avec une institution financière :

Dès le lendemain de l’AG qui optait pour le partenariat, le conseil d’administration et le secrétariat exécutif de Mooriben ont pris contact avec la banque agricole du Niger (Bagri-Niger) pour discuter des conditions d’un accès des membres de Mooriben au crédit. Cette démarche a été accompagnée par un cabinet juridique recruté par Mooriben pour le besoin.

Ainsi, le 1er juin 2012, un protocole d’accord avec la Bagri a été signé. Ce protocole porte essentiellement sur le financement par la Bagri de trois activités qui entrent toutes dans la chaîne de la production agricole (intrants agricoles, warrantage et commercialisation des produits agricoles).

Pour renforcer le protocole d’accord signé avec la Bagri et créer les conditions d’un accès équitable de toutes unions au crédit dans la transparence, une politique de crédit a été adoptée par le CA en mai 2012 et un comité mis en place pour sa mise en œuvre.

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SOS Faim appuie depuis de nombreuses années des organisations paysannes en Afrique et en Amérique latine. Comme tout outil de développement, la microfinance doit être interrogée dans ses finalités, ses modalités et les conditions de sa mise en œuvre. C’est dans cet esprit que SOS Faim publie Zoom microfinance. Vous pouvez retrouver cette publication, en version téléchargeable sur le site Internet de SOS Faim : www.sosfaim.org

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