Bilan et performance des boutiques d’intrants et des organisations de producteurs au Niger.
Préparée par Assia Saou Musoko et Magdalena L. Blum, FAO 2016.
Cette étude a été réalisée avec la participation des représentants de Fédérations d’organisations de producteurs possédant des boutiques d’intrants dans leur portefeuille d’activités, entre octobre 2012 et juin 2013.
Une boutique d’intrants (BI) de type coopératif est une entreprise à caractère économique offrant des services de proximité (prestations de service et vente d’intrants agricoles : semences, engrais, produits phytosanitaires, et produits vétérinaires ; la location de petits matériels agricoles). Elle est mise en place par une ou plusieurs OP, pleinement responsables de sa gestion. Elle fonctionne comme des distributeurs privés, qui vendent les intrants au comptant, mais avec pour principales différences que la vente se fait aussi en petits conditionnements de 2 kg et que les bénéfices des BI sont réinvestis, soit pour la maintenance de la BI, soit pour augmenter son fonds de roulement.
Le projet IARBIC avait dénombré 1.054 boutiques d’intrants avant le lancement de l’étude et seulement 994 BI ont été recensées au cours de l’enquête : la différence observée provient d’établissements ayant été considérés par erreur comme des BI alors qu’il s’agissait de banques céréalières, de magasins de warrantage, etc. Certaines BI n’exerçant aucune activité, le nombre total des BI opérationnelles retenues pour l’enquête a été ramené à 785 boutique d’intrants en activités.
Conclusions sur l’état des lieux des BI au Niger
Les OP représentent l’acteur principal du développement de l’approche : 86 % des BI appartiennent à des OP, parmi lesquelles 49 % sont affiliées à une faîtière. L’évolution du fonds de roulement des BI est positive dans le cas des OP affiliées, mais négatif dans les cas des BI d’OP non-affiliées.
Les délais observés entre la construction et l’ouverture de la boutique (un an et demi en moyenne) et les délais dans la constitution du fonds de roulement initial nécessaire au démarrage de l’activité représentent un frein au processus de création de nouvelles boutiques.
Si le nombre de BI a fortement augmenté et compte 785 BI en activité (chiffre de 2013) dans les huit régions, le taux de fermeture des BI est également important (20 %). Une mauvaise gestion et des détournements de fonds sont les causes principales de la fermeture des BI.
Les BI disposent de stocks au moment de l’enquête, bien qu’elles connaissent des ruptures de stocks régulières. Les stocks des BI sont constitués essentiellement d’engrais (15-15-15 [NPK], urée, etc.).
La commande groupée reste une modalité d’approvisionnement encore peu utilisée (21 % des BI pour 312 tonnes en 2012).
Les quantités d’intrants vendues en 2012 aux femmes par les BI représentent 16 % (sur un total de 2 100 tonnes).
La grande majorité des BI sont gérées par des hommes et appartiennent à des organisations paysannes qui semblent être des structures mieux adaptées pour assurer la pérennité des BI. Elles demeurent ouvertes à tous les clients, membres ou non de l’OP propriétaire. 17 % d’entre elles pratiquent des différences de prix selon le statut du client.
8 % des propriétaires ont contracté un crédit bancaire, ce qui peut être considéré positif car cela indique un faible niveau d’endettement mais négatif au regard de la faible capacité d’investissement.
50 % des BI ne sont ouvertes qu’au cours de la campagne agricole, laissant ainsi certains agriculteurs, notamment ceux pratiquant la culture de « contre saison », sans possibilité de pouvoir acheter des produits et du matériel pendant le reste de l’année. Malgré cela, le nombre de clients augmente depuis, bien que le nombre de clients soit encore peu élevé, 251 clients par BI et par an.
Près de 50 % des BI ne font pas l’objet de supervision ni de contrôle de gestion.
Un autre point faible est constitué par le fait que, si elles disposent généralement d’un cahier unique de gestion, 25 % d’entre elles déclarent ne pas le tenir à jour. Cela gêne la pratique d’une bonne gestion et la capacité à renouveler le fonds de roulement, avec pour conséquence de possibles répercussions sur la viabilité, d’autant qu’un tiers des boutiques affiche un écart négatif entre leur fonds de roulement initial et leur fonds de roulement réel.
Conclusions sur la performance des boutiques d’intrants
Peu scolarisés, les gestionnaires (gérants et comités de gestion) manquent également de formation continue en gestion comptable/financière. La mise à jour des documents comptables n’est pas une règle généralisée pour la plupart des BI et l’attention est surtout portée sur l’état de la trésorerie.
Plus de la moitié des BI possèdent un compte d’épargne et la majorité fait un bon usage du fonds de roulement et des bénéfices. Le compte de la BI et de l’OP étant cependant commun dans la plupart des cas, il existe un grand risque de confusion entre destination et utilisation des fonds.
La vente d’intrants à crédit est une pratique répandue (pratiquée par 30 % des BI) mais elle doit être tenue sous contrôle et encadrée afin de ne pas faire peser un risque supplémentaire.
L’audit externe et la supervision par l’OP sont des pratiques encore peu répandues.
Les BI doivent améliorer leur capacité de gestion des stocks. Qu’elles soient dues à des facteurs externes (ruptures de stocks et quotas imposés par la centrale d’achat) ou internes (mauvaise gestion des stocks), les ruptures de stocks sont trop fréquentes. Face à la position dominante et concurrente de la CAIMA, qui fournit des intrants à prix subventionnés et fixe des quotas par boutique (2 tonnes par BI), les BI auraient tout intérêt à diversifier leurs sources d’approvisionnement (par le biais notamment de commandes groupées) afin de s’assurer de disposer des quantités requises pour répondre aux besoins de leur clientèle et au bon moment.
La majorité des gérants sont conscients du fait que leur BI ne satisfait pas totalement la demande de la clientèle (un client sur deux se fournit hors du circuit des BI). Le réseau des BI apparaît donc actuellement comme un fournisseur complémentaire dans un marché des intrants aux sources d’approvisionnement multiples, dont la CAIMA qui dispose de 186 points de vente concurrents des BI. L’implantation des BI a toutefois permis d’accroitre l’offre d’intrants (même si encore insuffisante) et a permis une augmentation de leur utilisation.
L’offre de produits n’est pas assez diversifiée (17 % seulement des BI ont diversifié leur offre d’intrants), ce qui est le signe d’un manque d’attention concernant les besoins de la clientèle.
Le prix des intrants ne semble pas être un critère important pour la plupart des clients, sachant que les intrants sont vendus avec peu de marge bénéficiaire et achetés souvent à prix subventionnés, rendant les intrants abordables mais pas toujours disponibles due au quantité limité fournie par la centrale d’achat. Ces mêmes clients apprécient les autres services offerts par la BI, particulièrement ceux rendus par le brigadier phytosanitaire.
Afin de mesurer l’impact des partenariats sur la performance des BI, une enquête a été réalisée sur un échantillon de neuf organisations (ONG, organisations internationales, etc.) 37 œuvrant au Niger dans les domaines de la production agricole et de la sécurité alimentaire.
Le soutien est en premier lieu financier et varie de 0,5 à 8 millions de FCFA selon la BI (moyenne comprise entre 3 et 4 millions de FCFA par BI). Il vise essentiellement la formation des gestionnaires (gérants et comités de gestion) de BI, des contributions à la construction et l’équipement des Bi, le suivi de l’activité et le renforcement des capacités des propriétaires des BI et la constitution d’un premier stock d’intrants qui sert à établir un fonds de roulement initial.
Sommaire :
- 1 Contexte et objectifs de l’étude
- 2 État des lieux de la situation des boutiques d’intrants et des organisations de producteurs
- 3 Performance des boutiques d’intrants
- 4 Performance des organisations de producteurs propriétaires de boutiques d’intrants
- 5 Capacités d’appui des fédérations d’organisations de producteurs
- 6 Analyse des thématiques transversales de l’étude
- 7 Recommandations de l’étude pour améliorer la performance
Cliquer ici pour les BI Etude à télécharger sur le site de la FAO, 69 pages + annexes, 7,3 Mo.